Le livre du jour : Sherlock Holmes, une vie par André-François Ruaud et Xavier Mauméjean

Verdict : bien

Ce livre de 2012 n’est pas un roman, mais une biographie, mais la biographie d’un personnage fictif n’est-elle pas du domaine du romanesque ? A moins que le personnage ne soit pas si fictif que ça ? C’est ce point de vue en tout qui domine dans le milieu de certains fans de Sherlock Holmes qui pratiquent ce qu’ils appellent « le jeu » et dont l’idée centrale est qu’il faut croire, ou faire semblant de croire, que Sherlock Holmes a réellement existé, que le docteur Watson a écrit les histoires que nous connaissons, Arthur Conan Doyle n’ayant servi que de prête nom et d’agent littéraire.

André-François Ruaud et Xavier Mauméjean se prêtent donc au jeu, et analysent les textes du canon holmesien, les journaux et évènements historiques d’époques et de nombreuses autres sources pour retracer une biographie aussi réelle que possible d’un homme ou d’un personnage qui est passé dans la légende.

Il y a un mois je critiquais les aventures improbables de Sherlock Holmes, une anthologie de pastiches autour du détective que je venais de finir, et que j’avais beaucoup apprécié. Ce qui m’avait amené à me décider à en lire plus et ne pas me contenter des quatre romans et cinquante six nouvelles du canon. J’avais enchaîné rapidement avec la Maison de soie, qui avait pas mal douché mon enthousiasme. Malgré son statut canonique, et la quasi unanimité des critiques, j’avais été horriblement déçu par ce texte, un roman policier correct mais qui s’entêtait à ne pas faire du Sherlock Holmes alors que l’auteur démontrait qu’il avait tout à fait compris comment en faire. Alors je suis allé voir qui critiquais ce livre en mal, et ce que ces gens recommandaient.

Sherlock Holmes, une vie, est un nom qui est revenu plusieurs fois, et j’ai gardé un bon souvenir du roman de Xavier Mauméjean que j’ai lu cet été. Je me suis donc lancé dans cet ouvrage, croyant à un roman. Je me suis vite aperçu de mon erreur, mais même si la lecture de biographies n’est normalement pas du tout mon truc, je me suis laissé accrocher et j’ai rapidement dévoré cet ouvrage d’une taille déjà conséquente.

Il faut dire que plus qu’une simple biographie, c’est un puzzle, une enquête. Les auteurs tentent de fournir une biographie complète du personnage à travers les maigres indices laissés dans les textes publiés par Arthur Conan Doyle, en y ajoutant quelques textes d’autres auteurs et surtout toute anecdote historique qui peut coller. Quand par exemple une Mme Holmes loue un logement dans une rue où Sherlock mentionne avoir habitué, et pile la bonne année en plus, les auteurs en déduisent que c’est bien la mère qui a loué un logement à son fils, encore étudiant et désargenté, et que cela confirme à la fois que Maman Holmes était toujours en vie à cette époque, et qu’elle avait gardé de bonnes relations avec son fils.

C’est donc une enquête minutieuse qui est réalisée, très crédible, avec de nombreux points qui sont laissés comme hypothèses. Watson mentionne de nombreuses fois qu’il change les noms et certains détails de ses enquêtes afin d’éviter de mettre dans l’embarras les clients de son ami, et récit fictif ou non il est certain que l’auteur des textes s’inspirait de personnes réelles qu’on peut toutefois identifier avec un peu d’astuce.

Il en va de même pour les lieux, l’intérieur du 221B Baker Street réel ne correspondant pas à la description qui en est faite dans ces histoires, mais certains immeubles de la même rue font des candidats très probables comme sources d’inspirations, ou véritable logis pour le détective.

J’imagine que ça reste une lecteur à conseiller uniquement aux amateurs déjà convaincus. Si l’on est pas fan du détective, ce livre risque d’être assez chiant. C’est l’histoire d’une vie extra-ordinaire, mais où l’on ne lit pas ce qui s’est passé, mais quels détails nous prouvent que ça réellement pu se passer. Vu mon intérêt du moment sur le sujet, j’ai bien aimé, pas sûr que j’aurais autant apprécié il y a vingt ans.

Pour aller plus loin :

J’avais pu admirer la solide culture de Xavier Mauméjean pour tout ce qui est XVIIIe siècle dans son ouvrage que j’avais lu précédemment. J’ai pu constater que cette culture ne se limite pas à ce siècle. En fait il s’agit d’un passionné de Sherlock Holmes qui lui a consacré plusieurs ouvrages.

Je ne connaissais pas André-François Ruaud, pourtant créateur et directeur de la maison des Moutons électriques, où est paru notamment le Club.

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