Le livre du jour : Panade à Champignac par Franquin

Dix-neuvième album de Spirou, Panade à Champignac est le dernier de Franquin avant qu’il n’abandonne la série pour se consacrer à Gaston Lagaffe. On retrouve d’ailleurs ce personnage dans les deux histoires qui composent l’album, particulièrement dans la seconde : Bravo les Brothers qui se situe plus dans l’univers du Gaston que dans celui de Spirou, puisque l’histoire se passe dans la rédaction du journal et la ville alentour.

L’album de 1969
Le second récit, ressorti seul bien des années après

J’ai connu Spirou dans ma jeunesse, avec les albums de Fournier, et sans dire que c’était mauvais, je n’accrochais pas vraiment. Peut-être avais-je lu l’un ou l’autre des albums de Franquin, je ne sais plus, mais pour moi Franquin c’était Gaston Lagaffe, qui reste une de mes séries de BD favorites. Toute ma relation au monde du travail s’est construite à travers Gaston Lagaffe !

J’ai redécouvert Spirou plus tard, dans les années 90 avec Tome & Janry, et l’album la Frousse aux trousses et j’avais pris une sacré claque, je ne suis pas le seul d’ailleurs.

Mais Panade à Champignac est bien loin de l’aventurier Spirou de la période Tome & Janry. On retrouve dans ce premier récit les lieux et personnages que Franquin a créé (Spirou lui même ayant étant une création antérieure dont Franquin n’a fait qu’hériter) : le village de Champignac bien sûr, et son « sorcier » Pacôme Hégésippe Adélard Ladislas, comte de Champignac, mais aussi Zorglub, le Marsupilami …

En bref, Franquin s’est sans doute fait plaisir et a dit adieu à tous ses personnages avant de partir. Une bonne partie de l’histoire repose sur Zorglub retombé en enfance, et le reste sur la nostalgie ressentie par un Zorglhomme qui souhaite revivre le temps de la gloire de Zorglub. La thématique est, je crois, assez évidente. On a aucun mal à retrouver dans un Comte de Champignac, épuisé parce qu’il doit s’occuper d’un Zorglu retombé en enfance, l’image de Franquin qui souhaite abandonner Spirou depuis un bon moment et se cherche un replaçant.

Tout se finit très bien d’ailleurs. Zorglub redevient adulte, le Zorglhomme (dont le nom est « papa » en gros …) se contente d’un poste de jardinier au service de son ancien maître, et Franquin confit le bébé à d’autres pour se concentrer sur Gaston, une création totalement personnelle. Oui, la nostalgie c’est bien, mais il faut savoir aller de l’avant.

Je relis tous les Spirou, en ce moment, et j’ai pu suivre avec intérêt l’évolution du village de Champignac, depuis le petit bourg paumé du début des années 50 dans « Il y a un sorcier à Champignac » où l’automobile n’existait quasiment pas, jusqu’au village « moderne » der derniers albums. Même si l’évolution est plus visible dans les premiers albums, il est intéressant de voir ces transformations qui sont les reflets de la transformation réelle de l’urbanisme dans la deuxième moitié du XXe siècle.

On peut facilement retrouver des thèmes proches dans la deuxième histoire. Celle-ci a été écrite avant la première, et la situation de Fantasio ressemble, parait-il, à la situation réelle de Franquin, épuisé et surmené. Pour ma part je pense plus au personnage de Noé, un génial dresseur d’animaux, qui perd ses « bébés » préférés parce qu’ils appartiennent à un cirque et non à lui. Là encore, le parallèle me parait évident. Franquin devra abandonner ses créations Zorglub, le Comte de Champignac, entre autres, en abandonnant Spirou, mais il gardera toutefois les droits sur Gaston (forcément), et le Marsupilami, qui n’apparaîtront donc quasiment plus après cela.

Je ne peux m’empêcher de faire le rapprochement avec le film « Astérix : Le Secret de la potion magique » qui aborde une thématique proche, mais cette fois du côté de l’héritier.

On sent aussi la volonté de Franquin de faire du Gaston Lagaffe puisque cette histoire se rapproche bien plus de cette série que d’un Spirou ordinaire, non seulement dans l’univers, mais aussi dans les ressorts comico-poétiques. Sans doute est-ce la raison pour laquelle c’est aussi bon.

Dernier album de Franquin donc, qui clôt un premier age d’or pour Spirou. On va passer à la période Fournier.

Skeuvre, le vrai Champignac, à visiter
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