Le livre du jour : Les montagnes hallucinées par H. P. Lovecraft

Verdict : bien.

J’en parlais hier, et au vu de la longueur du texte, je me suis dit, pourquoi pas ? J’ai donc enchaîné la lecture du Sphinx des glaces de Jules Verne, suite non officielle des Aventures d’Arthur Gordon Pym de Poe, avec la lecture des Montagnes hallucinées, autre suite non officielle de ces mêmes aventures d’Arthur Gordon Pym. De toute façon, ce livre était dans ma pile à lire, je n’ai donc fait que l’avancer de quelques places.

Je ne serai pas contre posséder cette version …

En dehors de sa relation avec le roman de Poe, Les montagnes hallucinées est aussi l’un des récits les plus classiques de Lovecraft, que, contrairement à beaucoup d’autres, je n’avais encore jamais lu jusqu’à aujourd’hui. C’est désormais chose faite.

J’attendais pas mal de ce récit. J’aime beaucoup Lovecraft d’un côté, ce récit étant l’un de ses classiques, j’en attends donc déjà beaucoup, mais en plus j’ai un petit faible pour tout récit qui va se passer dans la neige, les montagnes, ce genre d’ambiance. Ici on parle de montagnes fantastiques situées en antarctique, donc ça part bien.

L’ambiance est tout de suite différente dans ce texte quand on la compare à celle d’autres récits de Lovecraft, le récit date de 1931, publié en 1936, et la technologie semble plus présente que dans d’autres récits. On se situe tout de même dans le contexte d’une expédition scientifique en antarctique, c’est donc logique, mais ça nous change des récits habituels. Un autre point important est l’absence de mystère : en explorant une cité antédiluvienne et cyclopéenne, le protagoniste, qui est aussi le narrateur, découvre de nombreuses fresques dont il tire une histoire très détaillée de la citée et de la race des « anciens » l’ayant construite.

Trop détaillée même sans doute, car même si le protagoniste a le prétexte d’être professeur à l’université de Miskatonic, et d’avoir lu plus ou moins par hasard le Necronomicon et d’autres textes ésotériques, il n’est « que » géologue et semble posséder une connaissance très étendue du mythe de Cthulhu avant même que ne commence le récit.

Habituellement, c’est plutôt l’inverse qui se produit : un incident inexplicable pousse le narrateur/protagoniste à se renseigner, il découvre alors le mythe, établi des parallèles avec ce qu’il a connu et peut alors sombrer dans la folie après avoir laissé une trace écrite. Or, malgré ses connaissances préalables, ainsi que la difficile expérience vécue en antarctique, le narrateur garde ici la tête sur les épaules, et ne fait publier son texte que pour empêcher toute exploration future des montagnes découvertes.

J’aurais préféré quelque chose de plus suggéré, et moins expliqué. L’ambiance, dans des montagnes perdues plus hautes que l’Himalaya et situées dans un coin inexploré de l’antarctique, est au top, mais le récit manque de la découverte progressive que l’on a généralement. Le découpage est lui aussi un peu surprenant. Lovecraft a l’habitude de récits à la première personne, dans lesquels le narrateur annonce dès le début que l’on va être confronté à des horreurs surnaturelles qui lui font douter de sa raison. Ici on retrouve quelque chose de semblable, mais pour garder le plus « juteux » pour la fin, le narrateur commence par un résumé de la mission scientifique qui va jusqu’à sa conclusion, avant de revenir en arrière et décrire plus en détail la partie la plus importante. Malheureusement on peut déjà quasiment tout deviner dès le premier passage et la description détaillée devient un peu redondante, si ce n’est pour l’ambiance.

Un peu sombre mais pas mal dans l’ambiance.

Contrairement au Sphinx des glaces, Les montagnes hallucinées ne sont pas une suite évidente au récit de Poe. Les aventures d’Arthur Gordon Pym sont mentionnées une fois en début de roman, et une seconde fois, de façon plus développée, à sa conclusion. Le lecteur est libre d’interpréter ces mentions comme la preuve que ces aventures sont considérées réelles dans l’univers de Lovecraft, tout comme elles sont considérées réelles dans l’histoire de Jules Verne, et dans ce cas de faire un lien direct avec les découvertes effectuées par le narrateur et son expédition en antarctique. On peut aussi n’y voir qu’une simple référence, une suite plus spirituelle que réelle.

La démarche est donc très différente, c’est un peu décevant par rapport à ce que j’imaginais, mais pas moins bon pour autant.

Globalement, j’en attendais un peu plus, ce roman court reste bon, avec une ambiance forte qui va vraiment titiller l’imagination, mais il ne fait pas parti, pour moi, des meilleures réussites de Lovecraft, et je pense qu’il doit son succès au choix du lieu.

Pour aller plus loin :

Les aventures d’Arthur Gordon Pym, bien sûr. Et plus généralement les œuvres de Poe qui sont à mon avis l’une des grandes sources d’inspiration de Lovecraft.

Le sphinx des glaces que j’ai critiqué hier.

Le reste des écrits de Lovecraft, tout le mythe de Cthulhu.

Ce texte a connu de nombreuses rééditions, et adaptations, en manga, en jeu de rôle. Il a également inspiré le célèbre film « The thing » de John Carpenter.

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